Tout droit sorti d’un film de Douglas Sirk
Tanguy Viel
lors de sa résidence d’écriture ce printemps à la maison De Pure Fiction
Ici la fenêtre ouvre en Cinémascope sur le jardin, encore que jardin convient mal, plutôt déploiement de nature en même temps que stellaire quand, dans le format allongé de la vitre, ciel et terre se partagent équitablement le cadre. Voilà qu’à force de se tenir là, assis derrière le bureau, on se sentirait comme derrière une vitre sans tain par laquelle j’ai le sentiment d’observer, caché comme un voyeur dans une chambre d’hôtel, le mouvement du dehors. Quand je pense à cette impression si sophistiquée de ma seule perception, je me dis surtout que je n’aurais pas dû abuser des trois cents films posés là dans la bibliothèque : voilà qu’à cause d’eux j’ai perdu le sens hiérarchique des niveaux de réalité et que le chevreuil que je vois presque chaque matin devant la fenêtre semble tout droit sorti d’un film de Douglas Sirk.