La poésie a des mains d’homme…
Le cheval Péguy
Jean-Luc Seigle – Editions Pierre Guillaume de Roux
Jean-Luc Seigle a du style. Après son précédent roman En vieillissant les hommes pleurent, on retrouve dans ce bref récit des fulgurances, une retenue aussi, d’où jaillit une émotion que l’on peut dire d’enfance, une émotion pure. Charles Péguy, Jeanne d’Arc et le temps sont la grande affaire de ce texte mais pas seulement. Il y a aussi le seigle avec lequel la grand-mère et la mère de Péguy rempaillent les chaises. Ou ces pages pour dire la poésie : « La poésie a des mains d’homme. Si le petit Charles aime tant les chevaux, c’est parce que les chevaux marchent, trottent, gambadent, courent comme tous les hommes qu’il connaît, en sabots. » Et plus loin quand la mère raconte le ciel à Charles enfant, ces voix que l’on entend et qui nous font Homme. On y devine Jean-Luc Seigle tout entier, il est là qui soulève son récit de son tumulte, de son passé, ses racines le traversent. Les phrases qu’il a au sujet des pauvres, qu’Hugo appelait les malheureux, et pourquoi ils doivent craindre la misère ont force de vérité.
« Les pauvres accumulent toujours. Ils s’encombrent autant que le ciel est encombré. » Tout est essentiel dans ce livre et c’est assez rare pour être souligné Le cheval Péguy transmet un élan et délivre une plénitude tant il est accompli. Sa construction est bluffante et laisse abasourdie. En quatre mots tout est dit : « son père imaginaire : Jeanne. » Lisant Seigle, on lit dans Peguy et on comprend, on partage le mystère de qui trouve sa vie à écrire.
Le cheval Péguy – Jean-Luc Seigle – Editions Pierre Guillaume de Roux