Existent aussi les mots question, frémissement, délicatesse. Et…
Ariane Monnier
lors de sa résidence à la maison De Pure Fiction
Nuit. La lune tombe dans le jardin – au milieu du champ où de jour j’étais le garde – et chaque soir les perles d’un collier effleurent le pied des arbres. Les livres dorment dans la bibliothèque. Les arbres dorment, la maison dort: sur le mur, dans la pièce d’écriture, un petit âne des montagnes et du désert continue de marcher, ses ballots dans le dos, d’un pas régulier, bien posé sur le sol. Il raconte qu’il porte des couleurs et des lettres, qu’il les transporte, de table en table, de villes en villes, pour les déposer dans les livres. Il raconte qu’il lui arrive de transporter aussi des phrases entières de gens qui n’en veulent pas et de les donner à d’autres qui les attendaient.
Par exemple : « Quelqu’un a fait du ciel une toile et a dispersé une sorte de poudre qui fait penser à l’or, comme le fond révélé d’une eau très claire, il arrive de voir dans le ciel les traces de ces minuscules grains d’or. Chacun d’entre eux contient un livre d’images. C’est tout ce que je voulais dire. Voilà le ciel, qu’écoutent les arbres, existent aussi les mots question, frémissement, délicatesse. Et le mot printemps. »