Une envie d’escalopes panées…
La condition pavillonnaire
Sophie Divry – Editions Notabilia
Ce livre est diabolique. La vie est plus souvent qu’à son tour infâme, on le sait et ce roman de Sophie Divry n’a de cesse de nous le rappeler, cependant on ne le lâche pas. Avec un culot qui tient sacrément la distance des presque trois cent pages qui suivent, l’auteure commence son histoire sur les chapeaux de roue. Elle étire le temps, le triture et d’une écriture qui a la force de son ambition, elle fait à eu près ce qu’elle veut de son héroïne et du lecteur. C’est froid, coupant et l’héroïne ne porte même pas de nom. Peut-être, mais MA finalement aurait toute sa place dans un des films du grand maître du mélodrame Douglas Sirk. C’est cela La condition pavillonnaire, la vie racontée par le petit bout de la lorgnette, si le titre n’était déjà pris La vie mode d’emploi aurait parfaitement fait l’affaire, ou encore La vie matérielle, tant on peut difficilement être plus prosaïque que dans ce récit d’une femme et son désenchantement.
« Fut-ce le plus beau jour de ta vie? Aujourd’hui, tu te poses la question. Alors que tu as compris tout de suite l’inéluctable de la mort de ton grand-père, tu mis des années à prendre conscience de ce que signifiait se marier ou être mariée, être l’épouse de, être le second membre du foyer conjugal, être officiellement dans ce lien juridique et moral qui commence le soir du jour où finit la fête…
Les plus âgés d’entre nous sachant ce qui attend les mariés quand tout le monde est parti, la table débarrassée des couverts, les derniers au-revoir échangés, et qu’on se retrouve seule devant un réfrigérateur. » Tout est bon pour remédier à l’ennui : le yoga, la cause humanitaire, le psy, les cinq à sept avec un chef de service, le doux et persistant vrombissement de l’équipement électroménager. Rien n’y fait, le mari reste décevant, ainsi que la violence ordinaire souterraine, son travail de sape.
L’auteure a du souffle, on est avec elle et MA dans une vie minuscule et c’est ample comme tout. Sans compter qu’un livre qui vous donne envie comme rarement d’escalopes panées mérite que l’on ne boude pas son plaisir!
La condition pavillonnaire – Sophie Divry – Editions Notabilia