Le bonheur est dans le RER….
Le liseur de 6h27
Jean-Paul Didierlaurent – Editions Au Diable Vauvert
Auteur de nouvelles, Jean-Paul Didierlaurent nous enchante avec son premier roman, un conte de fées moderne, mettant en scène « les invisibles », ces gens que l’on ne voit pas, qui ne comptent pas, que l’on ne remarque pas, prisonniers d’une vie monotone, étriquée, fade et sans avenir, engendrée par une société qui n’existe que pour le paraître. Son anti-héros qui vit seul avec son poisson rouge, déteste son travail d’ouvrier employé au pilonnage des livres invendus. Pour un amoureux des mots, c’est un supplice. Alors, chaque jour, il descend dans les entrailles de « la chose », l’abominable broyeuse, qui transforme les livres en une bouillie immonde, et il
sauve quelques pages de la mâchoire insatiable. Ces pages, il prend l’habitude de les lire aux passagers du RER avec lequel il rejoint chaque matin le monde kafkaïen de son usine. La découverte d’une clé USB sur son strapontin favori va bouleverser sa vie. Le prince va bientôt rencontrer sa princesse, une dame-pipi pleine de verve et d’humour, qui s’ennuie dans sa vie souterraine. Le personnage du gardien de l’usine, qui ne s’exprime qu’en alexandrins est aussi un vrai bonheur : « c’est droit comme une épée un alexandrin, ça se débite debout…
On ne peut pas tricher avec un vers de douze pieds… » Une histoire touchante, terriblement dans l’air du temps, avec l’avènement du numérique, qui semble signer le glas du support papier que nous aimons tous, et qui n’est après tout peut-être qu’une transition. Sans doute l’un et l’autre pourront-ils cohabiter et nous réconcilier tous.
Le liseur de 6h27 – Jean-Paul Didierlaurent – Editions Au Diable Vauvert