Un jeune homme mortel…
Le roi n’a pas sommeil – Cécile Coulon – Editions Viviane Hamy
Cécile Coulon a l’art de nous amener où elle veut, de nous faire croire à une réalité inventée avec force détails. C’est l’Amérique, ce peut-être presque partout ailleurs. Là où les miséreux côtoient une poésie qui ne demande qu’à être, et que l’on écrase d’un coup de talon ou d’une gorgée de trop. L’alcool brûle tout, il damne car il est un rêve noir. Beaucoup, est blessure dans cette histoire, elle mènera au drame et avec un culot parfaitement contrôlé Cécile Coulon commence par là, l’échec. Il n’y a pas que le roi qui n’ait pas sommeil, on lit et on traverse la nuit, et d’abord celle de Thomas Hogan et son innocence mutilée.
Les mots de Cécile Coulon ont une vivacité, son écriture, gonflée d’un flot débordant, est comme un courant. D’un coup de cisailles dans notre langue, elle projette les métaphores et nous voilà pris aux tripes presque délicatement. On ne sait si elle est de ceux qui écrivent comme ils respirent, mais ce que l’on sent, c’est la chair de ceux qu’elle invente, jusqu’à fourrer notre nez dans es cheveux souvent emmêlés de ses personnages.
Elle nous dit un monde fruste, âpre et farouche, elle dit les songes beaucoup trop grands mais qui restent quand même, et font du jour des ténèbres. Voyons un peu : « Les filles parlaient de lui comme d’une voiture qu’elles ne pourraient jamais conduire… Lui qui voulait montrer qu’en son sang coulait autre chose qu’un fleuve de mauvais souvenirs… Il ne pouvait pas passer entre les mailles du filet, les enfants doivent venir pleurer leurs parents disparus, quand bien même leurs yeux seraient aussi secs qu’un nid de tourterelles.«
On lit, on colle aux basques de Thomas Hogan et on se méfie. De sa mère trop belle, trop douce, trop silencieuse, de son père, un silex, de leur domaine encore sauvage, mausolée à ciel ouvert, plein d’une rosée, avec un air d’incendie.
Le roi n’a pas sommeil – Cécile Coulon – Editions Viviane Hamy