L’impression d’être dans un roman d’effroi…
Arno Bertina
lors de sa résidence d’écriture à la maison De Pure Fiction pour son prochain récit aux éditions Verticales
Elles sont électrisées comme des ados françaises sur le point de sortir alors qu’elles savent les violences parfois terrifiantes auxquelles la nuit les expose, ou les livre, dont les ados françaises ne connaissant même pas le début – une cuite, vomir et puis c’est tout. Dans la vie de ces très jeunes congolaises, la plupart des rapports tarifés s’apparentent plus à des viols et des agressions qu’à des rapports tarifés mimant – bien ou mal – la tendresse et – bien ou mal – le respect de la femme en tant que personne. Plusieurs fois, en les écoutants, j’ai eu l’impression d’être dans un roman d’effroi, où la personne qui te fait face n’est qu’un sac d’hémoglobine, un punching ball. Ce sont des adolescentes et des jeunes femmes, en même temps. Elles vont au-devant de ce qui va les piétiner, les humilier, peut-être les détruire. Elles montent à l’assaut de la nuit la fleur au fusil, elles vont se faire cueillir, et comme moi dans la cour pour percevoir leur amusement, il leur faudra du temps pour percevoir que c’est l’enfer. Cela semble étrange ? C’est aussi qu’elles n’ont pas ce luxe de dire « C’est l’enfer » c’est un luxe car cela signifie qu’il y a un ailleurs, autre chose à vivre, une autre vie possible. Ce qui n’est pas le cas. La misère la plus dure est sans bords, sans ailleurs. Elles sont corps et âme à cette misère, à ces conditions de vie, elles cherchent un amoureux dans leurs clients.