A livre ouvert avec Lucile Bordes

Lucile Bordes écrit les ombres ourlées d’une lumière, elle écrit au bord du monde, et ses livres publiés aux éditions Liana Lévi sont une chambre noire où beaucoup se révèle. Son prochain roman est un territoire tout d’une mémoire d’un temps à-venir. On y entre à découvert.

Racontez-nous où commence un livre

Je ne sais pas.
Où il n’y a pas de mots, et il faut en mettre. Une question qui est restée sans réponse, une chose qu’on a oubliée, ou perdue, un lieu, un visage, un geste qui « en disent long ».

Avez-vous des rituels d’écriture ? Pouvez-vous nous dire ce temps suspendu de « quand on écrit »

Des rituels différents pour chaque lieu où j’écris. Mais un bureau portatif, toujours le même, qui tient dans une caisse, ou un sac de courses : 
– un stylo plume Lépine offert par des collégiens, 
– un critérium, 
– une gomme, 
– un feutre fin de couleur, 
– une cafetière italienne, 
– deux ou trois carnets, 
– deux ou trois livres illustrés ou photographiques, 
– mon ordinateur portable, 
– mon transistor (éteint)

Quand vous lisez, vous êtes où, vous êtes qui ? Que se passe-t-il alors ?

Pendant que je lis, le monde bouge autour de moi. Moi je suis absente, je me suis absentée, partie en Russie par exemple où m’entraîne le livre que je tiens entre mes mains, autour le monde bouge.
Si je suis installée dans la véranda, la mer passe son train de vagues derrière la jetée. Le vent chahute le jasmin et les branches de l’olivier.
Mon fils dort.
Le chat s’étire sur le bureau.
Dans l’impasse les ouvriers rient et parlent fort.
Le monde bouge un chien aboie le mien est mort et quelqu’un crie.
Le soleil se déplace, lentement.
Le chat roule sur le dos.
Chez les voisins, on reçoit. Je lis.

Si vous deviez être une phrase quelle serait-elle ?

« Écrire, c’est tenter de savoir ce qu’on écrirait si on écrivait ». (Marguerite Duras)

Racontez-nous votre Il était une fois… une maison d’écrivains

Une maison d’écrivains, ce n’est pas une maison d’écrivain. Pour moi c’est un havre de paix, un espace et un temps dont les contours m’échappent, un lieu où être ici maintenant – je n’y arrive nulle part ailleurs. C’est un lieu auquel je me livre. Le jeu de mots est involontaire, il est joli, non ?

Aux mots nature et horizon, à celui de Lot ou Occitanie, par quels mots répondez-vous ?

Sauvage, branches, blanc, aube .

Vous ferez quoi Lucile Bordes quand vous serez grande ?

Rock star !