Cette place presque clandestine…
Georges Borgeaud
Le soleil sur Aubiac
Editions Zoe
« C’est sur le Causse de Limogne, justement, que se situe le hameau du Grès, partagé entre celui du haut et l’autre du bas. J’habite celui du bas, qui est au bord d’une doline… La maison du Grès a guéri chez moi une instabilité peut-être plus spirituelle que physique, la dispersion de l’esprit qui souhaite être ailleurs que là où la fatalité le fixe.J’ai compris que le Causse pouvait brièvement devenir la Terre Promise… Elles étaient toutes là, les primevères officinales de mon herbier d’écolier, la centaurée, le réséda sauvage, le millepertuis, le pissenlit, la si délicate scabieuse, la bourrache et toutes les graminées droites comme des étendards à l’échelle des sauterelles et de bestioles réveillées qui chevauchaient leurs tiges. Enfin, de frileuses violettes blanches s’étaient mises à l’abri derrière un mur bas, comme si elles voulaient se dérober à la main qui chercherait à les cueillir, à chaque printemps fidèles à cette place presque clandestine… L’essentiel était de demeurer toujours saisi par d’innocentes émotions sans quoi la vie serait insignifiante»