Le train décolle
Néhémy Pierre-Dahomey
lors de sa résidence à la maison De Pure Fiction
Le train démarre. Il est à l’heure.
Je laisse la résidence De Pure Ficton le cœur gros comme ça, chargé. Comme on laisse la première nuit avec un être déjà aimé – adulé. Je regarde les autres avec l’humble hauteur de celui qui détient un secret aussi unique que commun : une fille ou un garçon, sa première règle ou son premier jet.
La résidence De Pure Fiction est un souvenir non entamé. Encore du présent, bien loin de l’instant.
Pendant près d’un mois, sous le triangle noir, le monde et moi, nous avons parlé, approfondi la connaissance que nous faisons chaque jour l’un de l’autre, parce que le meilleur chemin de l’introspection passe toujours hors de soi : par la lucarne, dans les premières pousses du printemps, autour de la table de pingpong avec un enfant, ou dans les jambes délicates et rapides d’un chevreuil. Le monde et moi, nous avons parlé : lui de son moi, moi de mon monde : que d’infinis nous reste-t-il à explorer ?
Il est neuf heures. Le train se lance. Chaque branche d’arbre par le hublot est une note de kora.