Ce grand cadavre encore chaud de l’amour…
Lionel Duroy – Vertiges – Editions Julliard
Quand on a lu Le Chagrin de Lionel Duroy on ne peut qu’être curieux de ses autres livres qui sont autant de poupées russes abritant un seul coeur, celui d’une mère monstre. Chaque ligne ou presque de cet auteur la convoque dans un mélange d’attirance et de répulsion constant. Pour Vertiges, Duroy remonte encore le cours du temps et déroule le fil d’une histoire vieille comme le monde, l’histoire d’un amour. Deux êtres qui vont vouloir croire l’un en l’autre et qui s’y blessent. Salement. Une nouvelle fois, l’auteur narre dans le détail, les élans et les soubresauts de son couple, nous livrant une intimité sans réserve, il la traque et en devient sa propre proie. Alors oui, ce roman porte bien son titre, il est vertigineux de coller à la pensée toute nue d’un qui bien plus qu’ausculter, autopsie, à la manière d’un légiste on ne peut plus consciencieux ce grand cadavre encore chaud de l’amour. Et l’on veut avec lui savoir comment on en est arrivé là. La construction impeccable pousse le texte dans des retranchements où le lecteur s’engage à son tour sans réserve et l’on se prend à partager le désarroi insurmontable du narrateur quand suppliant sa femme de ne pas le quitter, elle lui répond avec ces mots sans appel : « Mais je vais rencontrer quelqu’un ! » Ce je vais dit tout des cendres sous lesquelles couvent un nouveau feu prêt à partir et qui déjà s’embrase.
Lionel Duroy – Vertiges – Editions Julliard