Une voix singulière, hardie et ardente…
Chambre 2
Julie Bonnie – Editions Belfond
Chambre 2 est un premier roman assez bluffant. On l’ouvre, intrigué par cette histoire de femme(s) au singulier et au pluriel; celle de Béatrice, si entière, amante et mère, fiévreuse et flouée. Celle aussi de toutes les accouchées d’une maternité dont prend soin Béatrice qui jouit quand elle accouche. Les autres n’en sont pas là… et le roman dit bien l’expérience totale, chaque fois unique, l’effroi aussi qu’il peut y avoir à livrer passage au fruit de nos entrailles, de nos espoirs, nos prochains renoncements. Extraits : « Quand on a perdu un bébé on se rend compte qu’on peut donner la mort. C’est une possibilité. Donner la vie/ donner la mort. Donner la vie donner la mort. Le corps peut fabriquer l’un ou l’autre. Pas forcément par notre faute, pas du tout notre décision. On est dépossédé du choix. Tu voulais un bébé vivant ? Tu en as un mort. Tu voulais un bébé mort ? Il est vivant. Tu as un bébé vivant? Il peut mourir. On ne pense pas assez à la mort quand on donne la vie. »
« J’étais offerte. Ces petits me rendaient heureuse. Leurs mains, leurs pieds, leurs bouches, leur coeur qui bat à cent à l’heure, leurs ventres ronds, leurs boucles de cheveux en soie, et les épaules si peu robustes et pourtant bien là, et leurs odeurs, tous leurs petits sons. »
« J’assiste à la naissance d’une mère, c’est presque plus émouvant que la naissance d’un enfant. »
On referme le livre, curieux de la suite car ces pages abritent une voix singulière, hardie et ardente. C’est suffisamment rare dans la production littéraire du moment pour désirer la retrouver.
Chambre 2 – Julie Bonnie – Editions Belfond