Affamés d’espace, de vitesse, de viande…
Les éphémérides
Stéphanie Hochet – Editions Rivage
Quel étrange univers, que celui que nous brosse Stéphanie Hochet dans cette histoire de fin du monde. On est en Ecosse, dans une lande sauvage propice à la sauvagerie, on est aussi à Glasgow, à Londres, à Paris, avec une prostituée liante qui distille ses spécialités, avec des chiens barbares et goulus, des chimères conçues pour nous survivre, on est avec une mère drôlement barrée, on peut dire siphonnée par cette petite qui lui est poussée d’entre les entrailles, ou encore avec Alice, la faussement douce Alice, perverse à souhait, par qui le châtiment arrivera. « Les Dogs ont quitté leur chenil. Ils courent. La lande les appelle. Ils sont affamés d’espace, de vitesse, de viande. Ils sont déjà des assassins. Un premier massacre a été commis. Je les ai perdus de vue. C’est fini, à peine eu le temps de leur dire au revoir. Le cordon est coupé, l’élevage se disperse, ils partent dans des directions différentes, seuls les petits suivent leur mère, ces petits qui sont notre fierté, qui nous ont demandé tant d’efforts, et plus que des efforts, de la foi et de l’imagination. Ils ne craignent pas le froid, ils aiment la nuit et ça tombe bien parce que c’est ce qu’ils vont trouver sur leur chemin. Quand la terre sera illuminée d’une splendeur nocturne. Aucune fugue, aucun voyage, ne ressemblera à celui-là. »
Tout comme Lars von Triers dans Mélancholia, auquel on ne peut s’empêcher de penser, l’auteure distille ici une menace prégnante. On y croit à cet espace temps d’avant la catastrophe, on est dans ce que sera demain, on est aujourd’hui. Les différents couples que forment tour à tour les personnages ont quelque chose d’inconfortable et d’attirant, d’âpre, on sait que tout cela va mal finir, on l’espère. On ne sera pas déçu.
Les éphémérides – Stéphanie Hochet – Editions Rivage