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Maison d'écrivains (le Blog)

A livre ouvert avec Patrice Pluyette

A livre ouvert avec Patrice Pluyette

Patrice Pluyette aime à explorer infiniment. Le plus proche, il en fait des lointains. Chacun de ses romans est une aventure en terra incognita dans ce vaste monde des histoires que l’on se raconte, des livres que l’on écrit. Jusqu’en terre De Pure Fiction .

Photo : Patrice Pluyette par Astrid di Crollalanza





Racontez-nous où commence un livre

Un livre commence au milieu de l’écriture du précédent, par des sensations, des images qui sortent du cadre du livre que je suis en train d’écrire et qui deviennent un peu trop récurrentes et insistantes pour que je ne les traite pas. J’ai alors besoin de faire une pause et de travailler à ce nouveau livre pour lancer le suivant et reprendre le précédent.

Avez-vous des rituels d’écriture ? Pouvez-vous nous dire ce temps suspendu de « quand on écrit »

J’écris au réveil, devant un mur blanc pour rester concentré, dans une pièce plongée dans la pénombre, rideaux ou volets tirés. Mais le jour doit entrer, je dois voir un tout petit bout de dehors pour les moments où j’ai besoin de respirer. Pas de musique (plus de musique, en fait, car j’ai longtemps écrit avec France Musique en sourdine). Le silence. Rien que ma musique intérieure à moi, que j’essaye de trouver, de retrouver et de restituer.
Le temps suspendu de l’écriture est un moment court dans la journée (entre 1 et 3 heures, rarement plus) où je suis un chercheur dans son laboratoire, un enfant aux commandes d’un vaisseau spatial. Je fais ce que je veux, comme il me plaît. J’ai l’impression de retrouver le temps de l’enfance, le temps du jeu et de la création qui a nourri mon enfance. J’en ressors souvent fatigué mentalement mais revigoré, comme si je m’étais restructuré après la nuit, rangé, défoulé, lavé pour la journée. Ensuite il y a le temps de la marche, qui suit immédiatement celui de l’écriture, au cours duquel je pense à ce que j’ai écrit, et où je continue à écrire, où les pistes de travail du jour suivant me viennent. C’est en marchant que j’ai écrit tous mes livres.

Quand vous lisez, vous êtes où, vous êtes qui ? Que se passe-t-il alors ?

Si je lis c’est que je trouve dans le livre une voix, une âme, au travers d’un style et d’une vision singulière. Sinon je ne poursuis pas. Il m’arrive bien souvent pour cette raison d’abandonner un livre à la première phrase. Ou de le remettre à plus tard. Quand je lis je suis plongé dans l’univers que me propose l’auteur, et en même temps dans le mien, dont j’essaie de trouver des résonances avec le monde qui se déroule entre les lignes. Je suis donc à la fois quelqu’un d’autre que le livre m’apprend à découvrir, et profondément moi-même, sous des aspects que j’ignore parfois. Un bon livre laisse une grande part de liberté au lecteur, afin qu’il puisse évoluer à sa manière, grandir à l’intérieur de l’espace textuel. Un livre vous aide à comprendre le monde et la vie mais aussi vous-même. Et il m’aide à me connaître et à me situer en tant qu’écrivain. Il me procure du plaisir, qu’à mon tour j’ai envie de procurer en écrivant, mais d’une autre manière. Et il répond parfois à des besoins de connaissance documentaire sur tel ou tel sujet que j’aborde dans mon roman ou aborderai un jour.

Si vous deviez être une phrase quelle serait-elle ?

« Si le bonheur existe, c’est une épreuve d’artiste. »
Michel Berger, dans la chanson Cézanne peint.

Racontez-nous votre Il était une fois… une maison d’écrivains

Il était une fois une maison d’écrivains qui se situerait en pleine nature, loin du fracas du monde, comme une bulle en suspension dans le temps et l’espace. Avec plein de livres à l’intérieur, et des films à volonté. La maison de Pure Fiction, quoi! Mais pour y vivre de façon définitive j’y rajouterai les bruits et la présence de ma femme et de mon fils, indispensables à long terme, pour me rassurer quand j’écris et distiller dans l’air un supplément de vie où aller puiser des ressources. Des gros chênes autour de la maison (comme chez moi en Bretagne), et la mer pas loin (comme chez moi aussi).

Aux mots nature et horizon, à celui de Lot ou Occitanie, par quels mots répondez-vous ?

Pureté, liberté, vie, virginité, immensité.

Vous ferez quoi Patrice Pluyette quand vous serez grand ?

J’essaierai de me sentir petit afin de toujours pouvoir mieux écrire.